Bâmiyân.

La Prise de Kaboul

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Antoine Stevenson
Antoine Stevenson

Nous décidâmes de contourner Bagram par l’ouest pour concentrer nos forces sur Kaboul. Cette manœuvre nous mena rapidement à la périphérie de la ville, où nous préparâmes notre prochain mouvement. En arrivant à l’orée de la ville, nous prîmes position sur les hauteurs au niveau du hameau de Qala-i-Mirza. Alors que les premières lueurs de l’aube perçaient le ciel, nous lançâmes deux escadrons de cavalerie Ouzbeks et Kirghiz à l’attaque de Kaboul.

Depuis mon poste d'observation sur les hauteurs de Qala-i-Mirza, je suivais avec admiration l'avancée du régiment Ouzbek.

Alors que nos réserves de munitions s'amenuisaient, nos légionnaires étaient prêts à engager le combat à la lame du sabre et ils passèrent à l'action sans hésiter. Pendant ce temps, les Ouzbeks avaient habilement détourné l'attention des talibans pour permettre une infiltration discrète de Kaboul par l'ouest. Depuis mon poste d'observation sur les hauteurs de Qala-i-Mirza, je suivais avec admiration l'avancée du régiment Ouzbek. Les hommes d'Ouldarai réussirent à s'enfoncer d'environ un kilomètre à l'intérieur de la ville, mais leur progression fut brutalement interrompue. Les ruelles étroites de Kaboul entravaient sévèrement la progression des chevaux.

Descendant de leurs montures, les hommes d’Ouldarai se lancèrent dans un combat au corps à corps, leurs pas virevoltant tels des éclairs dans l'obscurité des rues. Ce fut ensuite à notre tour de descendre vers la vieille ville. Avec Choegya, je pris le commandement de l'escadron Kirghiz et Tibétain, connu pour ses frasques.

Notre mission était de déloger les commandants talibans retranchés dans le palais de Darulaman. Cet édifice néoclassique, orné de colonnades corinthiennes, avait longtemps abrité le ministère de la défense afghan. À mesure que nous nous rapprochions, nous anticipions l’affrontement. Les soldats talibans, tentant de maintenir leurs positions, devinrent des cibles vulnérables. Nos cavaliers, rapides et déterminés, ont rapidement envahi l'enceinte, déclenchant un bain de sang dans les halls historiques du palais.

Les défenseurs luttaient avec une énergie désespérée, tandis que les rares civils encore présents dans le bâtiment jetaient par les fenêtres tout objet à portée de main : écrans d'ordinateur, chaises, bureaux, rien n'était épargné. À l'extérieur, la situation n'était guère plus calme. Depuis les faubourgs, j'observais l'escadron Kirghiz avancer méthodiquement. Les hommes de Choegya investirent rapidement le quartier de l’université, situé à une centaine de mètres du palais, et prirent le contrôle d’une prison surpeuplée. Dans ce grand baraquement lugubre, des prisonniers affamés étaient évacués sans ménagement.

Les prisonniers furent conduits en procession sur l’immense avenue Darulaman qui débouchait sur Bash Babur. J’aperçu des légionnaires Kirghiz et tibétains en pleine négociation, l’un d’eux s’éloigna visiblement échaudé par la discussion qui venait d’avoir lieu. L'homme commença à s'adresser aux prisonniers, je n'ai pas entendu l'ordre qu'il leur a donné, mais j'ai vu la centaine de prisonniers alignés sur l'avenue Darulaman se mettre à genoux sur la chaussée. Seuls une dizaine parmi les plus robustes, sélectionnés au préalable par les Kirghiz, demeurèrent debout.

Puis soudain, j’entendis un bruit mécanique en provenance des jardins en bas du palais, une mitrailleuse installée sur des gradins tirait méthodiquement sur la colonne de prisonnier, qui s'effondrait là, les uns après les autres. Peu après, un groupe de soldats tibétains s’approcha pour mettre fin aux souffrances des blessés. Les tibétains demandèrent ensuite à la dizaine de prisonniers qu’ils avaient épargnés de mettre les cadavres au bord de la chaussée.

Les incendies se poursuivirent à travers Kaboul, jusqu’à la tombée de la nuit. Je fis exécuter quelques pillards à titre d’exemple. Choisis au hasard, les talibans se balançaient maintenant à l’entrée des boutiques dévastées, les yeux vitreux, la langue pendante.

Le soir, je rejoignis Choegya qui célébrait la prise de la ville en compagnie d'un groupe de soldats Kirghiz et Tibétains autour d'un feu. Ensemble, ils tachèrent la bannière boudhiste bleue et or du sang rouge vif d’un soldat taliban égorgé au pied du mât tandis qu’un aumônier tibétain psalmodiait des mantras en sanskrit, ses paroles me rappelaient les récitations de Namgar. Nos soldats passèrent plusieurs heures à rétablir l'ordre dans la ville. Beaucoup de fonctionnaires talibans avaient fui avec les forces en retraite. Les soutiens du régime talibans quittèrent en grand nombre la capitale et se dirigèrent vers la passe de Khyber pour trouver asile au pakistan.

Avec la chute de Kaboul, le régime taliban semblait sur le point de s'effondrer. Le moment me semblait propice pour proclamer un nouvel État afghan. Afin de tourner définitivement la page du passé taliban, j'envisageais de faire de Bamiyan la capitale du nouvel État et d'y transférer progressivement l'administration.

Je confia la charge à Choegya d’envoyer des émissaires dans tout l’Afghanistan pour annoncer la nouvelle et faire savoir au peuple que la guerre était terminée, marquant aussi le début d’une nouvelle ère pour l’Afghanistan.