Bâmiyân.

La Marche de la Légion Sogdienne

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Antoine Stevenson
Antoine Stevenson

Dans l'immense yourte où j'accueillais mes invités, la bannière bleue ornée de l'emblème de la roue de Dharma trônait derrière mon bureau, actant la transformation de notre régime en une théocratie bouddhiste. Cette bannière serait dorénavant la toile de fond des rencontres qui se tenaient dans ma yourte.

Son regard perçant reflétait non seulement sa sagesse et sa profondeur d’âme, tandis que le foulard sombre qu’elle portait, se parait de pierres précieuses.

Lorsque Sharam et sa nièce Despina franchirent le seuil de la tente, je fus à nouveau ébloui par la splendeur de la jeune femme. Elle dégageait une beauté et une élégance sans pareil, ses yeux profonds ornés de délicates marques lui octroyant une aura presque mystique.

Son regard perçant reflétait non seulement sa sagesse et sa profondeur d’âme, tandis que le foulard sombre qu’elle portait, se parait de pierres précieuses. La longue robe noire raffinée sertie de broderies dorées témoignait de son rang, une prestance dont elle était pleinement consciente et qu’elle assumait avec une élégance naturelle.

Devant une femme d'une telle beauté, je ne souhaitais pas nuire aux intérêts de sa famille. C'est pourquoi je proposa de maintenir Sharam dans ses fonctions de gouverneur. Ainsi il bénéficierait de l'honneur de participer aux conseils tribaux que nous organisions pour la gouvernance du pays. Sa présence y était essentielle, en tant que voix des Hazaras de Bamiyan. Sharam, avec une sagesse remarquable, accepta l'invitation à se joindre aux conseils tribaux.

L'idée de faire partie de ce nouveau conseil le ravissait, d'autant plus que, avec le transfert de la capitale à Bamiyan, il n'aurait plus à entreprendre le voyage jusqu'à Kaboul, où se tenaient auparavant les assemblées avant l'ère talibane. Pour marquer la fin de notre rencontre, je guidai Sharam et Despina vers une vaste yourte voisine. Là, je les conviai à s'asseoir à la table pour savourer un généreux plat de riz, agrémenté de viande assaisonnée. Je portais un dernier regard tendre sur Despina avant de prendre congé de mes hôtes.

La menace de la guerre se faisait de plus en plus tangible, Namgar restait inébranlable et avait persuadé la plupart des généraux de la légion sogdienne de prendre l’initiative de l’attaque. L’unification des peuples d'Asie centrale sous l'égide du bouddhisme s'était emparée de l'esprit des guerriers sogdiens, devenant leur obsession. Par ailleurs, Namgar avait rejeté mon souhait de le voir intégrer les rangs de la légion sogdienne en tant qu' aumônier. Il avait insisté pour pouvoir demeurer à Bamiyan où son audience grandissait de jour en jour.

Parmi les généraux, seul Ouldarai avait encore la lucidité nécessaire pour douter du bien fondé de notre projet d’invasion. Un matin, il vint me trouver dans ma yourte pour s’entretenir avec moi. « – Votre Excellence, tout en vous témoignant mon respect le plus profond, croyez-vous sincèrement que le moment est opportun pour entreprendre une offensive d'une telle envergure ? » puis après un moment de pause il reprit, « – Si nous lançons nos troupes à l'assaut de l’Asie centrale qui restera à Bamiyan » s’inquieta Ouldarai.

Sans réellement attendre de réponse de ma part, il enchaîna. « – Il est vrai que nous avons triomphé des talibans, mais l'état actuel de nos troupes rend peu envisageable une victoire face aux armées ouzbeks ou kazakhs. » Ouldari hésita un peu avant de reprendre « – Ne craignez-vous pas l’imprévisibilité de Namgar, le laisser seul ici serait une folie »

Tout en reconnaissant intérieurement les réserves d’Ouldarai, je me résolus à afficher une confiance inébranlable dans la justesse de notre entreprise : « – C’est précisément parce que personne ne nous craint que nous devons frapper maintenant. Quant à Namgar il garde toute ma confiance. »

Je poursuivis en énumérant nos objectifs de conquêtes, tout d’abord, la vallée de Ferghana, suivie par une avancée sur tout le territoire ouzbek pour affermir notre présence en Asie Centrale. Ensuite, nous dirigerons nos efforts vers le Tadjikistan et le Kirghizstan. Les vastes plaines du Kazakhstan et du Turkménistan seront les étapes suivantes de notre expansion.

Pour finir de convaincre Ouldarai qui était resté imperturbable, j’ajouta : « – Si le bouddhisme, en dépit de son essence méditative, a réussi à se propager du delta du Gange jusqu'au Japon et en Sibérie, c'est principalement en vertu d'un zèle missionnaire que nous incarnons à présent. »

Ouldarai hocha la tête en signe d'accord, puis s'éclipsa pour retrouver ses adjoints qui peaufinaient les plans. Des cartes de l'Ouzbékistan tapissaient les murs de la tente. C'était Choegya, le tibétain, maintenant porté par une foi presque mystique, qui supervisait les préparatifs.